06 octobre 2022

Chronique de Charles et voyage ADCL à CHYPRE

 

Voyage à Chypre 

Ayant eu l'opportunité de m'intégrer à un voyage de groupe de l'ADCL, je vais essayer de vous faire partager les impressions que j'en ai ressenties. Si tu penses que je vais te réciter l'itinéraire jour par jour, et de raconter par le menu ce que j'ai bouffé, tu tombes mal. Non, je vais te dire, par flash(es) [on n'est pas dans l'écriture inclusive que je trouve ridicule par ailleurs, c'est simplement que pour le pluriel du mot flash me pose problème], ce que j'ai vu et entendu, un pêle-mêle d'images, de notions historiques qui s'entrecroisent confusément (j'ai une petite tête et j'essaie de faire avec). 

Chypre est une île. Je le savais avant d'y aller, mais il a quand même fallu que je m'habitue à l'idée. Tu ne peux y accéder qu'à la nage, à la rigueur en bateau. Plus communément, et comme on était un peu pressés (c'était un séjour d'une semaine), on a préféré l'aérien au maritime. Déjà quatre heures de vol, ça te paraît long. Les hôtesses sont prêtes à te chouchouter, mais elles ont systématiquement le lecteur de carte de crédit à la main. Il n'y a que le ramassage des poubelles qui n'est pas payant, et là, quand on y réfléchit bien, c'est mieux qu'à la maison où tu les paie avec la taxe foncière (je suis un peu mauvaise langue, les toilettes non plus n'étaient pas payantes). 

Chypre est une île. C'est dire que si on n'y prend garde lors des déplacements, on risque vite de se retrouver de l'autre côté, et l'autre côté c'est partout, il y a de l'eau tout autour (c'est un peu comme ça pour toutes les iles, pour les atolls, c'est un peu plus compliqué, je pourrais te faire un dessin, mais là, on serait vite hors-sujet, et puis je ne sais pas dessiner, j'ai déjà du mal avec le traitement de texte). 

Chypre est une île avec un passé riche, très riche (8000 ans avant Jésus-Christ, le livre d'histoire comporte forcément quelques pages blanches, mais il y a quand même de quoi raconter, et notre guide ne s'en est pas privée (je te mets le « e » parceque notre guide était une femme, mais j'ai des doutes, je ne suis pas sûr qu'il faille accorder, d'un autre côté je m'en fous, vous n'aurez qu'à demander à quelqu'un qui sait, je voyageais avec du beau monde, il y avait une ex-inspectrice d'académie dans le groupe). Notre guide était une femme donc, charmante, diserte, cultivée, pieuse chrétienne orthodoxe à ce qu'il m'a paru, mais surtout intensément et sans modération chypriote. Te dire qu'elle n'aime pas les Turcs serait un euphémisme, mais attention pas les insulaires qui s'entendaient et s'entendent toujours bien avec les grecs chypriotes (tu peux aussi dire cypriote, c'est toi qui vois, tu peux économiser un « h » , il n'y a pas de petites économies...). Au passage, il semblerait que les anglais ne soient pas non plus sa tasse de thé (si je peux en l'occurrence me permettre cette expression). 

Chypre est une île carrefour : carrefour de grandes civilisations, carrefour des grandes routes commerciales, incidemment carrefour des croisades, même Richard Coeur de Lion s'y est marié au passage, avec Bérengère de Navarre si tu veux tout savoir, je n'ai pas réussi à savoir si c'était à l'aller ou au retour, tout compte fait on s'en fout un peu, c'était il y a longtemps, il y a prescription, et on n'est pas là pour une interrogation écrite. Tu ne peux pas t'y déplacer sans tomber sur des nécropoles antiques, des vestiges phéniciens, grecs, romains, paléo-chrétiens, ottomans, francs- médiévaux, j'en oublie certainement, je te les mets dans l'ordre à peu près, mais c'est au petit bonheur, tu trouveras bien un érudit sérieux qui t'aidera pour une chronologie plus pointilleuse. J'y ai vu des basiliques en ruines, des cathédrales ou ce qu'il en restait, de petites églises et des chapelles modestes enluminées de fresques somptueuses, j'y ai vu la cathédrale Sainte Sophie transformée en mosquée par les ottomans (à vrai dire je n'en ai vu que les échafaudages de la restauration, mais ça te donne une idée quand même. À Paris, les touristes qui tentent de voir Notre Dame ne sont pas plus gâtés). J'y ai vu des mosaïques romaines qui faisaient référence au Christ, une rareté paraît-il, j'ai même vu des mosaïques romaines d'avant les romains (mais là, c'est un peu confus, j'en suis moins certain). 

Chypre c'est du territoire anglais, enfin au moins un petit morceau, que si tu y commets un excès de vitesse, tu te retrouves devant un juge anglais, mais c'est anglais à moitié seulement, les propriétaires terriens restent chypriotes, comme je me le suis fait expliquer : si tu voles une pomme dans un verger de l'enclave britannique, de sont des policiers chypriotes qui interviennent et qui t'extradent vers l'Angleterre, bref, c'est aussi compliqué que pour Carlos Ghosn et l'imam Hassan Iquioussen, t'as vraiment intérêt à ne pas aimer les pommes. Séquelle du temps où l'île était tout à fait anglaise, tu roules à gauche, tu t'en fous un peu, tu es conduit en bus, mais j'ai personnellement eu beaucoup de mal à m'habituer à monter dans le bus à l'opposé de mes habitudes, à gauche, du côté du conducteur (si ça te paraît confus, fais une pause, je suis sûr que tu vas finir par comprendre). 

Chypre, c'est du territoire turc. Enfin ça, ce sont les Turcs qui le disent, et qui te le font bien sentir, avec des barbelés et des contrôles tatillons. La capitale a été coupée en deux, comme Berlin, mais en plus petit (Berlin, ça s'est arrangé, là, ça n'a pas l'air de prendre le chemin de l'apaisement). Les insulaires parlent pudiquement de territoire occupé, mais mon opérateur téléphonique habituel m'a bien fait remarquer que j'étais en Turquie (et plus en Europe donc hors forfait Europe). On en n'est plus à une aberration près, les habitants de cette zone, turcs chypriotes, ont droit à un passeport européen, c'est te dire si ce monde n'est pas simple.

Chypre, c'est une île très pénétrée de religion, le christianisme orthodoxe et l'islam y sont prédominants. C'est dire si les églises sont nombreuses. Je n'y ai pas vu beaucoup de mosquées (probablement qu'elles ne présentent pas un intérêt touristique majeur). En tout cas celle que nous avons visitée, je m'en suis vu refuser l'accès par un cerbère intransigeant : le règlement stipulait que mes rotules devaient être couvertes. Je portais un short pourtant décent, de style anglais, arrêtant juste au dessus de genou. J'ai tenté de négocier en l'abaissant à la taille, un peu comme les jeunes font maintenant, rien n'y a fait. Je me suis consolé à la pensé que le Prophète avait probablement dû graver quelque part (sur des omoplates de mouton selon la tradition) que les genoux étaient excitants et sexy, ça m'a fait chaud au cœur de savoir que mes zones patellaires pouvaient susciter des émotions salaces (et répréhensibles?) chez quelqu'un et ainsi le détourner de Dieu. Dans les églises, j'ai noté la hauteur invraisemblable de la chaire (le sermon pouvait venir de haut), il fallait une échelle pour y grimper, et aussi une certaine agilité semble-t'il. Je n'ai pas eu l'occasion de le vérifier, j'aurais eu trop peur du sacrilège... 

Chypre, c'est l'île d'Aphrodite, et là, on est dans le dur : elle a du pedigree la bête : déjà connue chez les babyloniens et les phéniciens, déesse de la fécondité et de l'amour (tout un programme), voila-t'il pas qu'elle sort de l'écume justement à Paphos. On sait à quoi elle ressemblait (sauf pour les bras) puisqu'on l'a identifiée comme « la Vénus de Milo », et aussi qu'elle avait un tempérament certain (en bref et moins élégamment, elle avait la cuisse hospitalière) si l'on en juge par le nombre de ses partenaires connus, dieux et mortels, tout lui était bon. C'est ça la réputation, tout n'est pas forcément vrai, mais comme on dit, mais on ne prête qu'aux riches. Comme on dit, avec admiration pour ce qui me concerne, mais pour d'autres parfois avec une certaine condescendance réprobatrice, elle avait du tempérament, c'est un peu normal, ce n'est pas qu'une coïncidence, Chypre est une île volcanique. Nous avons même pu visiter un des lieux de ses rencontres avec Adonis, une source dont l'eau était censée nous rajeunir (j'y ai trempé les pieds sans résultat probant, j'avais au moins espéré des chaussettes neuves). 

J'ai tendance à me méfier des voyages dits culturels, avec un programme surchargé de visites d'édifices et de lieux qu'il ne faut manquer sous aucun prétexte, moi qui suis un béotien pragmatique peu enclin au romantisme, un peu rustre peut-être me diras-tu, lors de ce séjour itinérant, je ne me suis pas ennuyé une seconde, il faut dire que je m'y suis longuement imprégné de culture locale, non, je n'ai pas appris le grec, encore moins le turc, par contre j'ai fait une cure intensive l'apéritif local, l'ouzo, ceci expliquant probablement cela. En tout cas, j'y retourne quand tu veux...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Quel plaisir Charles de te lire, d'autant que l'âge ( 92 e ) ne me permet plus de voyager !